Images de la cérémonie d'investiture de la présidente tanzanienne Samia Suluhu Hassan le 3 novembre 2025 ( Tanzania Broadcasting Corporation (TBC) / - )
Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, après des manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.
Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.
"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.
La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.
La présidente tanzanienne Samia Suluhu Hassan réinvestie après un scrutin contesté et plusieurs jours de manifestations réprimées dans le sang,le 3 novembre 2025 ( Tanzania Broadcasting Corporation (TBC) / - )
"Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, a été investie devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.
La présidente sortante a selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.
L'opposition a dénoncé d'importantes irrégularités le jour de l'élection, critiquant un gonflement du taux de participation, établi à 87% selon la commission électorale.
Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations contre le régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet a été coupé pendant cinq jours, ralentissant considérablement la sortie d'informations.
l'ONG de surveillance de la cybersécurité Netblocks a indiqué sur X lundi soir que le pays était à nouveau en partie connecté, mais avec d'importantes restrictions sur les réseaux sociaux.
Un journaliste de l'AFP a constaté un retour intermittent de la connexion internet, avec un accès très limité aux réseaux sociaux.
Des photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, ont commencé à circuler, en dépit d'un SMS de la police avertissant que la diffusion d'images en ligne "qui peuvent créer la panique ou humilier les gens" serait punie.
- Cadavres -
Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.
Des hommes armés masqués sans insigne visible circulent en camion à Stone Town au lendemain du scrutin présidentiel contesté en Tanzanie le 30 octobre 2025 ( AFP / MARCO LONGARI )
Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, avait estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité.
Le lendemain, ce porte-parole, John Kitoka, a fait état d'au moins 800 tués.
Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes, ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.
D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.
Jour de vote à Stone Town sur l'île de Zanzibar en Tanzanie, le 29 octobre 2025 ( AFP / Marco Longari )
La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire la faible affluence dans les bureaux de vote, des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".
Les écoles sont restées fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. Le gouvernement a annoncé une reprise des activités mardi.
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".

0 commentaire
Vous devez être membre pour ajouter un commentaire.
Vous êtes déjà membre ? Connectez-vous
Pas encore membre ? Devenez membre gratuitement
Signaler le commentaire
Fermer